Les normes de beauté dans la littérature jeunesse
Les personnages des livres pour enfants sont toujours représentés avec des attributs esthétiques intentionnelles. Le choix de leur silhouette, de leur couleur de peau, de leurs vêtements sont l’aboutissement d’un processus créatif orienté qui vise à mettre en cohérence leur apparence et leurs valeurs. Les gentils sont beaux et courbes ; les méchants sont laids et pointus.
Cette interprétation simple des formes et des proportions facilite la compréhension de l’histoire, pour les enfants, en rendant visibles les motivations et la nature de chaque protagoniste. Mais elle fausse notre jugement quand il s’agit des personnes qui nous entourent – réelles et non plus fictives. Même si l’illustration jeunesse – dont les styles graphiques sont très libres et tendent volontiers vers le symbolique, la beauté des personnages est souvent corrélée à leur bonté. Or, la définition de cette beauté est problématique quand elle exclut ceux et celles qui ne répondent pas à ses critères.
C’est que les illustrateurs qui créent des personnages évoluent dans les mêmes espaces de discrimination et d’oppression systémiques que nous connaissons : la rue, la famille, l’entreprise, les réseaux sociaux, etc. Consciemment ou non, leurs idées, voire leurs préjugés, transparaissent dans leurs œuvres. Quels que soient leur talent et leur capacité d’empathie, et malgré les meilleures intentions, ils seront toujours porteurs de leur subjectivité.
Les personnages incarnent naturellement les croyances de leurs auteurs – celles, par exemple, que les grands sont courageux, que les belles sont douces, que les gros sont drôles, que les petits sont malins… Des croyances rarement neutres et inoffensives. Il ne s’agit pas de bannir les héros classiques de la masculinité – grands, beaux et forts – mais de diversifier nos modèles. En réinventant leur genre, leur corps, leur style, et en cessant d’associer l’obésité à l’opulence, le handicap à la pitié, la laideur à la cruauté…
Les mentalités changent, heureusement. Les illustrateurs, d’une part, sont de plus en plus conscients de ces enjeux de représentation esthétique et du caractère oppressant des normes de beauté. Le public, d’autre part, accepte de mieux en mieux la modernisation des archétypes traditionnels, au profit de personnages à l’apparence atypique, comme un magicien avec une cicatrice au front ou une sirène à la peau noire. Leur existence dans nos livres et nos imaginaires sont les reflets d’une société plus inclusive, ce à quoi à quoi participent les maisons d’éditions de livres personnalisées, comme Littérative. Et ce sont les enfants d’aujourd’hui, accoutumés à ces représentations, qui reprendront un jour le flambeau de la lutte pour la diversité et la tolérance.
Sophie & Antoine de Littérative