Le page défaisant harnais de son âne

La question animale dans la littérature jeunesse

Le recours aux animaux pour raconter des histoires est aussi ancien que les histoires elles-mêmes. Ils apparaissent dès les premiers mythes de l’Antiquité. Les fables d’Ésope, bien avant celles de La Fontaine, mettent en scène des animaux anthropomorphes : le Loup, l’Agneau, le Corbeau, etc. Des personnages réduits aux traits de caractère humains qu’on leur suppose. Cette essentialisation permet de simplifier le récit en figeant les archétypes sans s’embarrasser de détails inutiles. Les scènes n’ont pas d’ancrage de lieu ni d’époque : leurs ressorts et leur morale dépassent le cadre de leur écriture originelle et peuvent résonner en chaque lecteur et lectrice.

 

Les contes traditionnels et, par extension, la littérature jeunesse, font un usage similaire des animaux anthropomorphes. Leurs personnages incarnent les qualités ou les défauts associés à leur nature animale : ils ne mentent pas. La popularité de Pierre Lapin (Beatrix Potter, 1902) ou de Babar (Brunhoff, 1931) auprès des enfants s’explique ainsi, notamment, par le fait qu’ils facilitent l’identification en gommant les aspects de genre, d’ethnicité ou de classe. Les situations qu’ils décrivent abordent les thèmes de la condition humaine ou, de manière plus prosaïque, la vie quotidienne chez les tout-petits avec, par exemple, le pingouin T’choupi (Courtin, 1992).

 

Les avantages de ce recours aux animaux sont, pour les auteurs et autrices jeunesse, conséquents. Des sujets matures, comme le rejet et la violence, peuvent être abordés sans heurter la sensibilité des enfants. A ce titre, les espèces représentées correspondent à des archétypes aisément identifiable et qui facilite l’appréhension des notions abstraites. Les fauves incarnent ainsi, naturellement, la force ; les oiseaux la liberté; les tortues, la sagesse…

 

Les animaux sont parfois représentés pour ce qu’ils sont, une approche édifiante quant à notre culture et nos mentalités. C’est alors leur rapport aux humains, souvent implicite, qu’il convient de questionner. La chasse, la captivité, l’élevage industriel, l’extinction des espèces sont autant de sujets nouveaux dont se sont emparés les auteurs et autrices jeunesse. Quant à leurs lecteurs et lectrices, il ne s’agit plus de s’identifier aux animaux, mais de ressentir pour eux de l’empathie et de leur reconnaître, comme pour nous, le droit de vivre libres et heureux.

 

Antoine de Littérative

logo Littérative
50 rue Broca | 75005 Paris 0033 6 18254024 contact@litterative.com
Suivez-nous
sur les réseaux sociaux !