La nature dans la littérature jeunesse
Les contes classiques, bien avant la littérature jeunesse moderne, ont captivé des générations d’enfants. Leurs textes perpétuent des mythes anciens, peuplés de monstres et de fées ; ils décrivent une nature magique, miraculeuse.
Les jeunes enfants, toujours curieux et crédules, demeurent sensibles à ces récits. Des éléments récurrents liés à la Nature nourrissent ainsi un imaginaire à la fois fabuleux et effrayant. C’est la forêt mystérieuse, qui mène au château de la Bête ; les animaux fabuleux – licornes, dragons ou elfes – souvent invisibles, parfois loquaces ; les esprits de la rivière, du vent ou de la montagne – tour à tour alliés ou ennemis des héros et des héroïnes.
Cette vision de la Nature s’est estompée au fil des siècles… L’avènement de la raison et la révolution industrielle ont dissipé la magie des paysages. De Perrault à Saint-Exupéry, les décors ne sont plus les mêmes. Les forêts luxuriantes ou ténébreuses ont fait place aux déserts de sable, aux étendues silencieuses ou conquises par la modernité. La critique littéraire Nathalie Prince évoque un renversement moral, du fait que l’humain, rapporté à la Nature, soit passé de bâtisseur à destructeur. Un renversement qui marque une désaffection, une défiance même, des enfants envers les adultes – comme Peter Pan fuyant Londres. Ce n’est que loin de la ville et des usines, par le voyage, que la nature recouvre ses forces : l’île au trésor de Robert Louis Stevenson et la jungle de Rudyard Kipling sont des paradis perdus et retrouvés. De même que la Forêt des rêves bleus, préservée par l’imagination d’Alexander Alan Milne.
Les auteurs et autrices jeunesse d’aujourd’hui, conscients des enjeux écologiques, réinventent heureusement des récits où les enfants, volontaires et courageux, pallient les erreurs commises par leurs parents. Leurs livres les invitent à jardiner, à planter, à découvrir et s’émerveiller de la moindre pousse. Avant de prendre leur place, un jour peut-être, dans les assemblées citoyennes responsables de leur propre avenir.
Des décennies de croissance et d’exploitation effrénée ont fait de notre planète une carrière à ciel ouvert… Et si nos enfants – et les enfants de leurs enfants – veulent continuer à l’habiter, c’est désormais à eux de la protéger.
Antoine de Littérative